vendredi 18 septembre 2009

Petit cours de geographie

Prenons deux pays au hasard. Disons, l'Ouzbekistan et le Tadjikistan. Regardons leurs frontieres de plus pres; que voit-on ? Tout d'abord, elles sont tellement irregulieres que l'on dirait qu'elles ont ete tracees par un epileptique defonce au crack. Ensuite, elles ne respectent que tres peu les realites ethniques de la region. C'est surement au cours d'une soiree tres arrosee que Staline, alors responsable du trace des frontieres des nouvelles RSS d'Asie Centrale, a decide de donner les villes historiquement tajiks de Samarcande et de Boukhara a la RSS d'Ouzbekistan. Pour reparer cette erreur, encore impardonnable aux yeux des tajiks, il a accorde la region ouzbeke de Khojand, au sud de la valle de la Fergana, au Tajikistan, bien que celle-ci soit separee du reste du pays par deux chaines de montagne atteignant plus de 5000 metres.

Resultat: l'Ouzbekistan, un pays a peu pres aussi grand que la France, est large de 50 km dans sa partie la plus etroite, le corridor qui relie la capital Tachkent et la valle de la Fergana au reste du pays. Quant au Tajikistan, Khojand, la deuxieme ville du pays, est a 12 heures de route (pour 250 km) de Dushanbe.

Prenons 3 peuples aux hasard. Disons, les Ouzbeks, les Tajiks, les Russes. Grossissons un peu le trait et generalisons.

Les Russes habitent dans le region depuis les debuts de l'expansion coloniale il ya 100 ans. Ils ont pour les locaux le mepris naturel du colon pour le colonise, surtout quand celui-ci est musulman. Pour les Ouzbeks et les Russes, le Tadjikistan est encore un repaire de moujahidines et de traficants d'opium. Il fallait voir la tete des quelques ouzbeks (et aussi la russe alcoolique rencontree dans le taxi entre Samarcande et Tashkent qui nous a litteralement fait une tete d'enterrement) a qui on a dit que l'on allait au Tadjikistan.Pour eux, c'est comme si on signait notre arret de mort.

Les Tajiks quant a eux, considerent les Ouzbeks comme un peuple sans culture (les autorites ouzbeks ont choisi Tamerlan comme idole autour de laquelle ils tentent de cimenter leur nation depuis l'independance, mettant en avant son unification du territoire ouzbek mais passant sous silence la violence de ses conquetes, alors que le heros national tajik est Rudaki, un poete persan du 9e siecle), sans histoire (les tajiks se reclament de 2500 ans d'histoire persane, alors que la "nation" ouzbek a ete plus ou moins inventee par les sovietiques) et sans eau (l'Amu-Darya, si crucial a l'agriculture ouzbeke et turkmene prend ses sources dans les montagnes de l'est du Tajikistan et un projet de barrage sur l'un de ses affluents ne met evidemment pas tout le monde d'accord).

Bref, tout ce beau monde est oblige de vivre ensemble en se detestant cordialement.



Fog of (Uyghur) war

Dans quelques jours (probablement Lundi, mais nos plans changent tous les jours), on passe en Chine. D'apres tous les voyageurs arrivant dans l'autre sens, l'acces a internet et les communications internationales sont coupees dans le Xinjiang. Ceci evidemment pour empecher les extremistes Ouighours de recevoir des instructions de leurs chefs d'Al Qaida. On risque donc de ne pas donner signe de vie avant 10 ou 15 jours. Dommage, j'aurais tellement enfin voulu ecrire un post intitule "No Sleep in Kashgar".

dimanche 6 septembre 2009

Voir les Pamirs et mourir

De retour de notre expedition victorieuse a Tachkent, nous sommes repasses par Samarcande pour franchir la frontiere et aller quelques dizaines de kilometres plus loin, a Penjikent. Samarcande (Ouzbekistan) et Penjikent (Tajikistan) deux villes tajiks reliees par un meme fleuve et une meme vallee, historiquement tres proches mais qu'une frontiere a la con tracee par un Staline bourre a la vodka dans les annees 20, et un poste frontiere regulierement ferme a cause de contentieux reguliers entre les gouvernements Ouzbeks et Tajiks ont presque completement separe, sauf pour les touristes.

Du cote Tajik, le poste frontiere etait compose de 2 baraques a frites en bois qui devaient dater de la glorieuse epoque sovietique. Bizarrement, le formulaire d'entree etait bien imprime, en trois langue et sans fautes d'anglais. Surement un coup de l'aide internationale. Dans la baraque a frites des douanes, j'ai rempli un peu incorrectement le formulaire de declaration de devises et le douanier a tente de me faire comprendre pendant 15 minutes qu'un fomulaire vierge pour reparer cette erreur me couterait quelques sums. J'ai joue a l'idiot assez longtemps pour epuiser sa patience (ma phrase preferee en Russe: "nie ponimay", "je ne comprends pas") et il nous a laisse partir sans bakchich.

A Penjikent, nous avons loue une tente chez le tenancier un peu mercantile de notre guesthouse (le prof d'anglais de la ville, qui a du devenir le Rockfeller local grace a sa guesthouse et peut obtenir ou arranger tout et n'importe quoi: un visa Khirghiz ? pas de probleme, mon fils connait le consul; un permis pour les GBAO -cf. plus bas- ? no problemo, j'appelle mon contact a Dushanbe et pour 35$ vous l'avez en deux jours; un taxi pour Dushanbe ? pas de probleme, j'appelle un conduteur qui va venir vous chercher demain matin pour 120 somonis; des soucis avec les garde-frontiere ? pas de probleme, je viens vous montrer comment on leur graisse la pate, etc. etc.) et nous sommes alles nous balader deux jours dans la montagne, le long de sentiers parcourus par des anes charges de fagots de bois jusqu'a un lac entoure de paturages. Nous y avons rencontre deux sympathiques bergers qui nous ont acceuilli avec de la vodka, des patates a l'huile et des "bonjour, ca va bien ?", signe que nous n'etions pas les premiers francais a etre passes par la...La nuit fut rude mais les paysages magnifiques. La bouteille de vodka sans fond de nos nouveaux amis bergers nous a permis de resister a la premiere et de pleinement apprecier les seconds. Pour diner, ils ont tenu a nous cuisiner un bon petit plov de fortune (des carottes, des oignons, du riz et beaucoup d'huile cuits sur un feu de bois dans une marmite ante-diluvienne) et vu que pour toute provision nous n'avions que du pain et des cacahuetes, nous n'avons pas su refuser leur hospitalite.

La route de Dushanbe est assez spectaculaire. Piste defoncee recouverte de cailloux pour la plupart de sa longueur, elle traverse des gorges inhospitalieres et des paysages de montagne epoustouflant, l'epoustouflage atteignant son paroxysme au passage du col d'Anzob, a 3400 m, quand les route tutoie les sommets enneiges et que de chaque cote, s'etend une vallee caillouteuse et profonde, lezardee par des dizaines de cours d'eau verdoyants. Non vraiment, c'etait de la balle ce trajet de 8 heures en 4x4 public. Sauf le passager dans le coffre qui a vomi a cote de nos sacs a dos. Lors de notre passage la route etait en train d'etre reconstruite par des equipes chinoises. Les Chinois, qui sont bien presents un peu partout au Tajikistan et se disputent aux Russes et aux Iraniens l'influence economique sur le pays.

Dans le centre de Dushanbe, si ce n'etait pour les montagnes que l'on apercoit encore au loin, on ne se croirait pas au Tajikistan. Larges avenues, fringues fashion et boutiques modernes, la guerre civile est bien loin. Les ONG sont probablement le moteur economique du pays, et les enormes Jeep du personnel du HCR, du PNUD et de l'UNICEF sont bien visibles dans les rues. Sino, le couchsurfeur qui nous a acceuilli dans son tres modeste appartement pour deux nuits, travaille lui aussi pour une ONG. Et tout le long des routes de province, des panneaux annoncent que tel pont ou tel village a recu l'aide de telle ou telle ONG. Bref, comme on dit au journal de France 2, le pays vit sous perfusion d'aide internationale.

Nous sommes arrives a Khorog, capitale de l'oblast autonome du Gorno-Badakhsahan (GBAO), souvent appele la region des Pamirs, hier a 2h du matin apres 18h de cahots dans un 4x4 dont le conducteur avait une tete de passeur de drogue. Une poignee de vallees encaissees jalonnees de quelques villages et reliees par quelques cols de plus de 4000 metres d'altitude, ce n'est pas forcement le coin le plus hospitalier de la planete mais avec la Chine a quelques centaines de kilometres et l'Afghanistan juste en face, on a l'impression d'etre arrives au bout du monde. L'Afghanistan, d'ailleurs que nous avons pu cotoyer hier au bazar afghan de Khorog (Ben) et d'Ishkashim (Mad), ou tajiks, afghans et touristes se cotoient une fois par semaine. J'ai rencontre la-bas un afghan qui parlait anglais et m'a raconte qu'il avait deja ete en Europe. Ou ca ? lui demande-je. "Republique Tcheque, Autriche, et meme en France ! Je connais Nice, Paris et... Sangatte". No comment.

Le jour ou on trouvera une connection internet un tant soit peu honnete je mettrais des photos en ligne mais d'ici la, on va faire comme pour a peu pret tout le reste dans les Pamirs: on va se contenter du minimum et attendre des jours meilleurs (ceci est surtout valable pour la cuisine et il faut avouer que je ne pense pas tenir longtemps avec du bouillon de patates deux fois par jour).

mercredi 2 septembre 2009

La muraille de Chine est tombee !

La muraille du visa chinois est tombee, degageant notre horizon et nous permettant de respirer un peu. Il faut avouer que c'est avec les petoches dignes d'une veille de bac que nous nous sommes diriges vers l'agence de voyage a Vendredi dernier a 17h. Mais finalement, l'agence n'avait pas demenage, nos passeports etaient la et dedans, notre visa pour la Chine.
Le seul hic, c'est qu'il faut entrer en Chine avant le 28 Septembre. Ce qui va raccourcir notre sejour au Kirghizistan mais finalement je ne vais pas me plaindre de quitter l'Asie Centrale russophone plus tot que prevu.